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Année 81, no 44      le 27 novembre 2017

 

Les dirigeants de Téhéran et de l’Arabie saoudite se disputent le Moyen-Orient

Les Kurdes repoussent des attaques au milieu de conflits grandissants

 
BRIAN WILLIAMS
Des disputes grandissantes entre les régimes capitalistes de Téhéran et de Riyad modèlent de plus en plus la politique au Moyen-Orient aujourd’hui. Les dirigeants capitalistes en Iran ont fait des gains significatifs dans des guerres en Irak et en Syrie dans le but d’établir un pont terrestre vers leur allié au Liban, le Hezbollah, et un accès à la mer Méditerranée.

La monarchie saoudienne essaie de contrer Téhéran en prenant des mesures pour mater le large réseau d’émirs et d’autres princes héritiers qui poursuivent leurs propres intérêts et pour approfondir des alliances avec d’autres régimes arabes bourgeois dans la région.

Avec la défaite de l’État islamique partout sauf dans quelques régions isolées de la Syrie et de l’Irak, Washington ainsi que Tel Aviv, le Caire, Ankara et d’autres régimes capitalistes de la région cherchent aussi à se positionner pour défendre leurs intérêts.

Téhéran a fait le plus de gains. Des officiers de la Garde révolutionnaire iranienne, des combattants du Hezbollah et des milices chiites, appuyés par la force aérienne de Moscou, ont repoussé les efforts du peuple syrien pour renverser la dictature de Bachar al-Assad. Les dirigeants de la Garde et la milice Hachd al-Chaabi ont renforcé la position des dirigeants pro-Téhéran en Irak.

Ils ont également repoussé les Kurdes. Avec le feu vert de Washington, ces forces ont pris Kirkouk et repoussé les Kurdes hors de plus de 30 pour cent du territoire qu’ils ont contrôlé et défendu contre les assauts de l’État islamique.

Téhéran est l’un des pays capitalistes les plus développés au Moyen-Orient, avec une aide croissante de Pékin et de Moscou pour avoir du crédit et étendre le commerce.

Par contraste, le règne monarchique et la structure sociale arriérée de l’Arabie saoudite ont ralenti le développement capitaliste dans le royaume, malgré ses énormes réserves de pétrole. Dans le but de modifier cette situation, le prince héritier Mohammed ben Salmane, le fils du roi, a dirigé une profonde purge contre d’autres membres de la famille dirigeante, incluant d’anciens et d’actuels ministres. Il a aussi pris des mesures pour renverser le pouvoir semi-autonome du ministère des musulmans wahhabites là-bas.

Riyad a annoncé des plans pour solliciter des investissements dans l’entreprise gouvernementale Saudi Aramco, le plus grand producteur pétrolier au monde, qui vaut environ 2 mille milliards de dollars. Le gouvernement britannique a promis une garantie de prêt de 2 milliards de dollars à Saudi Aramco si la mise en marché d’actions est faite à la bourse de Londres, alors que le président Donald Trump a voulu rappeler aux dirigeants saoudiens que l’utilisation de la bourse de New York pour la mise en marché était « importante pour les États-Unis. »

Le régime fait aussi la promotion de relations sociales bourgeoises plus modernes, comme la fin de l’interdiction aux femmes de conduire et de participer plus largement dans la vie publique.

Dans l’immédiat, les dirigeants saoudiens cherchent à empêcher le Hezbollah et Téhéran de renforcer leur position au Liban. Riyad a accusé Téhéran de tenter de déclencher une guerre là-bas. Il a fait en sorte que le premier ministre libanais Saad Hariri, pro-saoudien, a annoncé sa démission à partir de la capitale saoudienne, en disant qu’il avait peur d’être tué. Riyad a aussi demandé à ses citoyens au Liban d’en sortir « aussi vite que possible. »

Les dirigeants U.S. poursuivent leurs intérêts impérialistes

Les dirigeants de la classe possédante à Washington, de loin la plus grande puissance impérialiste dans le monde, soutiennent les efforts des Saoudiens pour enrayer les avancées de Téhéran tout en cherchant à imposer une certaine stabilité pour leurs intérêts dans la région.

L’administration Trump tente de renforcer la position de Washington, ainsi que celle de Riyad, Tel Aviv et de ses autres alliés, en cherchant à obtenir ce que le président appelle « l’accord final » entre Israël et les Palestiniens.

Washington reçoit l’aide des dirigeants en Égypte et en Arabie saoudite qui exercent des pressions sur l’Autorité palestinienne en Cisjordanie et sur le Hamas dans la bande de Gaza.

Washington estime que le moment est « mûr » pour cette poussée, a rapporté le New York Times du 12 novembre, parce que ces régimes arabes veulent « recentrer l’attention sur l’Iran. »

Trump a l’appui des deux partis dans cet effort. L’ancien conseiller de Barack Obama au Proche-Orient, Dennis Ross, a dit que son équipe a « fait un très bon travail. »

Washington a installé quelque 13 bases militaires à travers la Syrie, dont la plupart servaient à collaborer avec les Forces démocratiques syriennes dirigées par les Kurdes (SDF) pour repousser l’État islamique tout en essayant d’empêcher les troupes syriennes et du Hezbollah de faire la jonction avec Téhéran depuis la frontière irakienne jusqu’au Liban en passant par la Syrie.

Le régime d’Assad dit maintenant qu’il a l’intention de chasser les SDF de Raqqa et des parties de la province de Deir el-Zour qu’elles ont prises à l’État islamique. La question est de savoir si Washington « négociera » ce territoire en éloignant les forces dirigées par les Kurdes.

À leur rencontre au Vietnam dans le cadre du sommet de la Coopération économique Asie-Pacifique qui s’est tenu le 11 novembre, le président russe Vladimir Poutine et le président Trump ont convenu de maintenir les canaux de « désescalade » entre leurs forces armées en Syrie. S’opposant à l’indépendance kurde, ils ont tous deux réaffirmé leur appui à la souveraineté territoriale de la Syrie.

Les armes U.S. utilisées contre les Kurdes en Irak

Dans une interview accordée à Christiane Amanpour de CNN, l’ancien président du Kurdistan Masoud Barzani a fourni des détails sur le rôle qu’a joué Washington pour s’assurer que le résultat du référendum sur l’indépendance du Kurdistan, approuvée à plus de 92 pour cent, ne soit pas mis en œuvre et, après que le vote, pour autoriser les forces irakiennes et la milice Hachd al-Chaabi soutenue par l’Iran à attaquer le Kurdistan en utilisant des armes U.S.

« Ça ne m’a pas surpris de voir les forces irakiennes attaquer le Kurdistan, a déclaré Barzani. Mais ce qui m’a beaucoup surpris, c’est que ceux-là même que l’Amérique avait désignés comme terroristes [les milices iraniennes] nous ont attaqués avec des armes américaines sous les yeux des officiers et des fonctionnaires américains. »

Les 30 millions de Kurdes qui vivent en Irak, en Turquie, en Syrie et en Iran sont la plus grande nationalité dans le monde sans leur propre État.

Barzani a soutenu que Téhéran et Bagdad avaient l’intention d’attaquer les Kurdes qu’ils aient procédé au vote pour l’indépendance ou non. « Si nous avions perdu notre volonté, cela aurait été beaucoup plus grave que de perdre temporairement quelques zones, » a-t-il dit.

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