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Année 78, no 40      le 10 novembre 2014

 

Cuba contre les États-Unis : deux réponses
de classe à la propagation du virus d’Ebola
 

SETH GALINSKY
et STEVE CLARK

Le contraste entre la réponse rapide et sans réserve du gouvernement et du peuple révolutionnaires cubains à l’épidémie dévastatrice d’Ebola en Afrique de l’Ouest et l’inaction du régime le plus riche du capitalisme mondial à Washington est tellement flagrant que ces dernières semaines même les éditeurs du New York Times ont été obligés de le constater.

« Alors que les États-Unis et plusieurs pays riches ont été heureux de promettre des fonds, » a déclaré un éditorial du 19 octobre, « seules Cuba et quelques organisations non gouvernementales offrent ce qui est le plus nécessaire : des professionnels de la santé sur le terrain. » Même si « heureux » est très loin de décrire la réponse dérisoire et tardive des dirigeants des États-Unis, l’écart est flagrant. « Cuba jouera sans doute le rôle le plus robuste parmi les nations qui cherchent à contenir le virus, » a écrit le journal.

Ce qui fait l’objet de beaucoup moins de commentaires est la différence également nette entre les mesures décisives prises par la direction communiste de Cuba pour empêcher la propagation de l’épidémie au pays ou ailleurs dans les Amériques, et les mesures de santé publique tardives et erratiques des gouvernements fédéral et des États, ainsi que des partis politiques aux États-Unis, y compris la mise en quarantaine lorsqu’elle s’avère nécessaire pour empêcher de nouvelles infections.

Arrêter la propagation du virus Ebola
Cuba a envoyé 256 travailleurs de la santé, choisis parmi 15 000 volontaires, en Guinée, en Sierra Leone et au Libéria, beaucoup plus que tout autre pays au monde. Un complément de 205 bénévoles ont terminé une formation rigoureuse de trois semaines, y compris sur l’utilisation de combinaisons de protection intégrales, et attendent que l’infrastructure nécessaire soit mise en place.

Le gouvernement révolutionnaire de Cuba s’organise non seulement pour soigner les personnes infectées par l’Ebola, mais aussi pour minimiser le risque pour les volontaires médicaux et pour arrêter la propagation du virus. Tout cubain infecté sera soigné sur un site destiné aux travailleurs humanitaires internationaux en Afrique et ne retournera à Cuba qu’une fois remis de la maladie, rapporte Jorge Pérez, directeur de l’Institut de médecine tropicale Pedro Kouri de Cuba.

Tous les volontaires de retour à Cuba seront mis en quarantaine pendant 21 jours dans un hôpital.

Cuba permet aux voyageurs en provenance d’Afrique de l’Ouest de visiter Cuba s’ils entrent volontairement en quarantaine. Au 20 octobre, 28 personnes de la Sierra Leone, de la Guinée, du Congo, du Nigeria et de Cuba l’ont fait.

En revanche, les méthodes de l’« industrie » des soins de santé US, dont le but est le profit, et des gouvernements fédéral, des États et municipaux promettent beaucoup, font peu, et souvent, nuisent.

Il suffit de demander à la famille et aux amis de Thomas Eric Duncan, un visiteur libérien à Dallas qui, en septembre, s’est initialement vu refuser des soins et qui est décédé à cause du caractère de classe différencié des « soins » de santé aux États-Unis.

Deux infirmières qui ont soigné Thomas Eric Duncan ont également contracté la maladie mais ont survécu. Le syndicat des infirmières National Nurses United fait remarquer que ceux qui soignaient Thomas Eric Duncan avaient reçu une formation insuffisante, un équipement de protection inadéquat et aucune directive claire concernant les protocoles de sécurité de la part des agences fédérales.

Craig Spencer, un médecin qui est récemment rentré après avoir travaillé dans une clinique de Médecins sans frontières en Guinée, a passé deux jours à circuler parmi la population générale de la ville de New York, à jouer au bowling et à se déplacer en métro et en taxi après avoir commencé à se sentir malade. Il a été hospitalisé le 23 octobre et plusieurs personnes ayant été en contact avec lui ont été placées en isolement.

Cherchant à protéger leurs intérêts politiques face à ces fiascos, les politiciens capitalistes réagissent en employant des moyens bureaucratiques et insensibles correspondant aux relations sociales qui mettent les profits d’une poignée de familles capitalistes au-dessus de la solidarité humaine.

Le gouverneur du New Jersey Christopher Christie, par exemple, a ordonné que l’infirmière Kaci Hickox — tout juste rentrée de son travail avec Médecins sans frontières en Sierra Leone — soit confinée dans une tente devant l’hôpital de l’Université de Newark avec une toilette portable, sans douche et peu de lecture.

Aux antipodes de la quarantaine efficace et digne de 21 jours prévue pour les médecins et infirmiers cubains à leur retour ! Pour ceux qui se disputent l’honneur de servir comme membres de cette mission.

Devant ces échecs, des divisions parmi les dirigeants US se font jour, y compris entre la Maison-Blanche et sa hiérarchie militaire. Washington s’est engagé à envoyer 4 000 soldats afin de construire 18 cliniques de santé en Afrique de l’Ouest. Au 22 octobre, quelque 500 avaient été envoyés.

Le 28 octobre, le général Ray Odierno, chef d’état-major de l’armée, a ordonné que les membres de l’armée revenant des pays frappés par l’Ebola soient placés en isolement sur des bases US pendant 21 jours avant de rejoindre leurs familles, leurs amis et la population en général. Et le général Martin Dempsey, chef de l’état-major interarmées, a suggéré que tous les soldats US rentrant de ces pays soient mis en quarantaine.

Dans le but d’éviter un conflit politique préjudiciable avec les plus hauts gradés militaires qu’il a nommés, lors d’un point de presse le 28 octobre, le président Barack Obama a soutenu que de telles mesures étaient appropriées pour des soldats puisque leurs déploiements ne sont pas volontaires. « Nous ne pouvons nous attendre à ce qu’ils soient soumis aux mêmes règles, » a-t-il dit.

Mais s’agissant du personnel médical US en Afrique de l’Ouest, qui entre en contact direct avec les patients atteints d’Ebola et court un risque plus élevé, le président Obama a insisté qu’une quarantaine découragerait les candidats et minerait les efforts des institutions US « de continuer à diriger la réponse internationale. »

« Aucun autre pays, a affirmé le président US, fait autant que l’Amérique pour contenir et en fin de compte éradiquer l’épidémie. »

Mais ce n’est pas « l’Amérique » impérialiste, mais la Cuba socialiste qui « dirige la réponse internationale. » Ce que prétend la Maison-Blanche pour justifier sa démarche est un tissu d’hypocrisie et de mensonges.

Le 27 octobre, les Centres fédéraux pour le contrôle et la prévention des maladies ont annoncé de nouvelles mesures, y compris l’obligation pour la plupart des travailleurs de la santé ayant soigné ou travaillé à proximité des malades d’Ebola de se soumettre en personne à un examen médical quotidien et de communiquer leurs températures aux responsables locaux de la santé — mais sans restriction sur leurs activités jusqu’à ce qu’il soit établi qu’ils présentent des symptômes.

Leçons de l’épidémie du SIDA
Dans la lutte contre la propagation de l’Ebola, Cuba a adopté des mesures sociales similaires à celles qu’elle a utilisées pour combattre l’épidémie du SIDA. Des années 1980 jusqu’à 1993, tous les Cubains qui obtenaient un résultat positif au test étaient placés en quarantaine et, comme tous les Cubains, soignés gratuitement.

Parallèlement à une information suivie expliquant comment éviter de contracter le virus et la distribution généralisée de préservatifs, plus de deux millions de tests pour le virus ont été réalisés à Cuba pendant la seule année 2011. Les médecins sont aussi formés à être particulièrement vigilants à l’égard de maladies liées au SIDA.

Cuba avait un risque élevé de SIDA. Depuis la révolution de 1959, des milliers de volontaires internationalistes cubains — de soldats aux médecins et aux ingénieurs — ont voyagé partout dans le monde, de l’Afrique à Haïti et en Asie. Et alors que presque tous les cas de SIDA aux États-Unis sont de la même souche, il en existe 21 souches différentes à Cuba.

La voie prise par Cuba a donné des résultats. Son taux d’infection du SIDA représente un sixième de celui des États-Unis. « La population de Cuba est à peine plus nombreuse que celle de la ville de New York, » constatait un article du New York Times en mai 2012. « Pendant les trois décennies de l’épidémie mondiale du SIDA, 78 763 New-Yorkais sont morts du SIDA. Seulement 2 364 Cubains en sont morts. »

Aujourd’hui, les coopérants cubains en Afrique de l’Ouest sont conscients à la fois des responsabilités dont ils assument la charge et des raisons pour lesquelles une telle solidarité humaine est essentielle.

« C’est le plus grand défi auquel j’ai fait face dans ma vie, » a dit à la chaîne de télévision CNN le docteur Osmany Rodriguez, un vétéran des missions médicales cubaines au Venezuela et au Zimbabwe. « Arrêter la transmission [de l’Ebola] est important, a-t-il dit. Pas pour le peuple cubain, pas pour le peuple africain. Pour le monde entier. »

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